ANTOINE LECORNET
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Défense Pénale
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La détention provisoire n'est pas une fatalité !
Publié le 20 janvier 2025​
Avocat pénaliste à LILLE
La détention provisoire est une mesure privative de liberté appliquée dans le cadre de la procédure pénale en France. Elle soulève de nombreuses questions juridiques et éthiques, tant pour les prévenus que pour les avocats qui les défendent.
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1. Qu'est-ce que la détention provisoire ?
La détention provisoire désigne l’emprisonnement d'une personne mise en examen dans l'attente de son jugement. Contrairement à la peine de prison qui est prononcée après une condamnation, la détention provisoire intervient durant l’instruction, avant même qu’un tribunal n’ait statué sur la culpabilité de l’accusé. Elle est utilisée lorsqu’il existe des risques précis, tels que la fuite du prévenu, le risque de pression sur les témoins, ou la possibilité de récidive.
L’objectif de la détention provisoire est de garantir que le prévenu se présentera à son procès, mais aussi de préserver l’ordre public ou de protéger la victime ou la société.
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2. Conditions de recours à la détention provisoire
La détention provisoire n’est pas une règle, mais une exception. En effet, le principe fondamental en droit pénal est celui de la présomption d’innocence. Selon l’article 147 du Code de procédure pénale, la détention provisoire doit être décidée uniquement lorsque les mesures alternatives (telles que le contrôle judiciaire ou la mise en place d’un bracelet électronique) sont jugées insuffisantes.
Avant de prononcer une détention provisoire, le juge des libertés et de la détention (JLD) ou le juge d’instruction doit s'assurer qu'il existe un risque concret et actuel pour la société ou pour le bon déroulement de l’enquête.
Les critères d’application sont les suivants :
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Le risque de fuite : Si le prévenu a des antécédents de fuite ou s'il dispose de moyens importants pour échapper à la justice.
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Le risque de pression sur les témoins ou les victimes : Le prévenu pourrait chercher à influencer ou à intimider les personnes impliquées dans l’affaire.
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Le risque de récidive : Si le prévenu est susceptible de commettre de nouveaux actes criminels pendant l’instruction.​
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3. La durée de la détention provisoire
La durée de la détention provisoire est limitée, mais elle peut être prolongée par le JLD. Le Code de procédure pénale fixe des délais spécifiques pour chaque type d’infraction, et la détention ne peut excéder ces délais sans justification. Par exemple, dans les affaires de crimes les plus graves, la détention provisoire peut être prolongée pendant une période de 2 ans. Toutefois, la durée totale ne peut jamais excéder un certain plafond, et la prolongation doit être régulièrement réévaluée.
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4. Les alternatives à la détention provisoire
Bien que la détention provisoire soit parfois inévitable, le législateur a mis en place diverses alternatives pour éviter un emprisonnement injustifié. Parmi celles-ci, on trouve :
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Le contrôle judiciaire : Le prévenu est libéré, mais il doit respecter certaines obligations (pointage au commissariat, interdiction de se rendre dans certaines zones, etc.).
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Le placement sous bracelet électronique : Le prévenu reste à son domicile sous surveillance électronique.
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La caution : Un montant d’argent est versé pour garantir que le prévenu se présentera lors de son procès.
Les avocats jouent un rôle essentiel dans l’examen de ces alternatives et dans la défense des droits du prévenu, en veillant à ce que la détention provisoire ne soit ordonnée qu’en cas de nécessité absolue.
D'éventuelles irrégularités procédurales ("vices de procédure") peuvent également entraîner la remise en liberté lorsqu'ils sont détectés par l'avocat.
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5. Les conséquences de la détention provisoire
La détention provisoire a de nombreuses conséquences sur la vie du prévenu. Au-delà de la privation de liberté, elle peut avoir un impact sur sa réputation, son emploi, ses relations familiales et sociales. De plus, elle peut rendre l’exercice de la défense plus difficile, car l’accès aux pièces du dossier ou aux témoins peut être limité dans certains cas. La durée de la détention provisoire, même si elle ne constitue pas une peine, est parfois vécue comme une forme de "punition" anticipée.
L’avocat a un rôle clé pour s’assurer que ces conséquences sont prises en compte, et pour éviter toute détention abusive ou disproportionnée par rapport aux faits reprochés.
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6. La fin de la détention provisoire
La détention provisoire prend fin lorsque la personne est jugée, soit lors de son procès, soit lorsque le juge d’instruction décide de la mettre en liberté ou de lui substituer une mesure alternative. En cas de mise en liberté, il est possible de recourir à un contrôle judiciaire pour éviter toute récidive ou fuite.
Cependant, même après une décision de mise en liberté, un contrôle strict peut être imposé au prévenu, ce qui continue à restreindre ses libertés jusqu’au jugement définitif.
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Conclusion
La détention provisoire est une mesure exceptionnelle qui s’applique uniquement lorsque des raisons impérieuses le justifient. Elle doit respecter des garanties procédurales strictes et ne peut être décidée qu’après avoir examiné toutes les alternatives possibles. En tant qu’avocat, il est essentiel d’assurer une défense active pour protéger les droits du prévenu, en veillant à ce que cette mesure ne soit ni abusive ni injustifiée. La liberté d’une personne mise en examen, bien que présumée innocente, ne doit jamais être restreinte sans raison valable et proportionnée.
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Publié le 17 septembre 2024
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La loi définit l’agression sexuelle comme « toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur. »
L’agression sexuelle doit être distingué du viol, qui est caractérisé par l’article 222-23 du Code pénal comme étant « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol ».
La différence se situe, pour synthétiser, dans la pénétration, qui est absente dans l’agression sexuelle, avec cette précision que la fellation imposée à autrui est depuis peu considérée par la loi comme caractérisant le viol même sans pénétration, mais qui est présente dans le viol.
On sait, l’actualité récente le démontrant chaque jour davantage, que la priorité donnée à la lutte contre les violences sexuelles a fait bouger les lignes. Cet arrêt de la Cour de cassation s’inscrit dans ce mouvement consistant à reconnaître – et à sanctionner- de plus en plus largement les violences sexuelles en facilitant la charge de la preuve pour les victimes.
Le récent arrêt de la Cour de cassation du 11 septembre 2024 est ainsi venu préciser la notion de sidération.
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La sidération est définie comme « L'anéantissement soudain des fonctions vitales, avec état de mort apparente, sous l'effet d'un violent choc émotionnel »
Dans cette décision, la Cour de cassation indique que l’agression sexuelle commise sur une personne endormie est caractérisée malgré le réveil de la victime et son absence de réaction qui s’expliquait par son état de sidération : « En effet, les juges ont établi que le prévenu a agi par surprise en procédant à des attouchements sur la victime alors que celle-ci était endormie, puis en poursuivant ses gestes qui ont généré chez elle un état de sidération, qu'il a lui-même constaté, ce qui établit qu'il a agi en toute connaissance du défaut de consentement de cette dernière ».
La Cour de cassation considère donc, ce qu’on peut aisément comprendre, que le fait qu’une victime agressée dans son sommeil n’exprime pas explicitement, lors de son réveil, son désaccord, s’explique par son état de sidération, et non par son consentement.
On peut également faire une remarque complémentaire. En l’état actuel de la loi, le principe de la présomption d’innocence impose à la victime de prouver qu’elle n’était pas consentante, et que son agresseur avait conscience de son absence de consentement. En clair, et de manière très schématique, la victime doit démontrer qu’elle a dit « Non ».
Par cet arrêt, et quoiqu’il soit évident qu’il n’appartient pas à la Cour de cassation de dire le droit mais simplement de l’interpréter, la juridiction suprême vient dire qu’une absence de « Non » n’équivaut pas à un « Oui », ce qui paraît représenter un signe d’ouverture vers une modification de la loi et une protection accrue des victimes.
De nombreux acteurs de la société civile et associations appellent de leurs vœux, depuis plusieurs années, la nécessité de démontrer le consentement de son partenaire à la relation sexuelle : il ne s’agirait cette fois plus pour la victime de prouver qu’elle dit « Non », mais il faudrait au suspect démontrer que son/sa partenaire a dit « Oui », a défaut de quoi l’agression sexuelle ou le viol serait caractérisé.
Nous n’en sommes pas encore là mais l’arrêt de la Cour de cassation du 11 septembre 2024 pourrait être la première pierre d’une évolution majeure de la définition de l’agression sexuelle ou du viol.
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Retour sur l’arrêt de la Cour de cassation du 11 septembre 2024 (n° 23-86.657) : de la prise en compte de la sidération dans les agressions sexuelles et les viols
Publié le 10 octobre 2023
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La loi du 8 avril 2021 a créé un recours concernant les conditions de détention indignes.
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Cette requête doit être effectuée :
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Auprès du Juge des libertés et de la détention (JLD) en cas de détention provisoire ;
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Auprès du Juge d’application des peines (JAP) lorsque le détenu est définitivement condamné.
Cette requête, pour avoir une chance de porter ses fruits, se doit d’être particulièrement motivée et rigoureusement rédigée.
Il appartient notamment au détenu de justifier, dans la mesure de ses possibilités, de l’indignité de ses conditions de détention par des éléments circonstanciés, personnels et actuels.
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La juridiction saisie dispose d’un délai de 10 jours à compter de la réception de la requête pour se prononcer sur sa recevabilité.
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Si cette requête est jugée recevable, le juge ordonne au directeur de l’établissement pénitentiaire de lui transmettre, dans un délai de 3 à 7 jours, toute pièce ou toute observation permettant d’apprécier la dignité des conditions de détention.
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Le magistrat saisi peut également ordonner une expertise ou se rendre personnellement sur les lieux afin d’apprécier les conditions de détention.
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A compter de l’ordonnance constatant la recevabilité de la requête, la juridiction saisie dispose d’un délai de 10 jours pour statuer.
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Si le magistrat juge la requête bien fondée, il précise dans l'ordonnance rendue les conditions de détention qu'il considère comme contraires à la dignité de la personne humaine et demande à l'administration pénitentiaire d'y mettre fin par tout moyen dans un délai compris entre 10 jours et 1 mois maximum, notamment en transférant le détenu dans un autre établissement.
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L’administration pénitentiaire doit transmettre un rapport justifiant de la modification des conditions de détention jugées indignes.
A défaut, ou si ce rapport n’est pas satisfaisant, le juge ordonne le transfert du détenu dans un autre établissement pénitentiaire.
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Si le détenu est en détention provisoire, il peut être immédiatement remis en liberté.
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Le détenu ou son avocat peut faire appel des décisions, dans un délai de dix jours à compter de leur notification, devant le président de la chambre de l'instruction ou le président de la chambre de l'application des peines.
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Une première étude des décisions rendues permet de constater que les juridictions restent, malgré la loi du 8 avril, exigeantes en ce qui concerne l’appréciation de l’indignité des conditions de détention.
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S’entourer d’un avocat compétent, en mesure de préparer utilement un dossier complet et de plaider ensuite ce dossier devant la juridiction compétente est donc indispensable.
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Cette requête contre des conditions de détention indignes peut être accompagnée d’une requête en indemnisation déposée directement auprès du tribunal administratif territorialement compétent.
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Elle peut également être un excellent moyen d’obtenir un transfèrement vers un autre établissement pénitentiaire.
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Dans certaines conditions, le requête contre des conditions de détention indigne peut même permettre d’obtenir une remise en liberté.
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Si vous estimez que vous-même, ou un proche, êtes victime de conditions de détention indignes, n’hésitez pas à prendre l’attache du cabinet.
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Recours contre l'indignité des conditions de détention
Que faire en cas de condamnation à une période de sûreté ?
Publié le 8 octobre 2023
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Certaines infractions, considérées comme étant les plus graves, peuvent donner lieu par la juridiction au prononcé d’une peine assortie d’une période dite « de sûreté ».
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Cette période de sûreté correspond à un intervalle de temps pendant lequel aucun aménagement de peine n’est possible, pas plus qu’une permission de sortie.
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Les réductions de peine sont également suspendues pendant cette période.
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Les conséquences de cette période de sûreté sont évidentes : bloquer tout possibilité d’aménagement de peine.
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Le condamné conserve néanmoins la faculté méconnue de saisir le Tribunal de l’application des peines (TAP) d’une demande de relèvement de la période de sûreté.
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Cette demande peut être effectuée par le détenu ou par son avocat.
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Elle peut concerner tout ou partie de la période de sûreté.
Le Tribunal d’application des peines dispose d’un délai de 6 mois à compter de la date de la demande pour se prononcer.
Il convient de préciser que la demande en relèvement de la période de sûreté doit s’appuyer sur des gages sérieux de réadaptation sociale.
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Compte tenu de son caractère exceptionnel, cette demande doit s’appuyer sur un dossier préparé de manière particulièrement méticuleuse, qui rend l’assistance d’un avocat spécialisé particulièrement utile.
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Il est en effet impératif de justifier d’un projet de réinsertion complet, complété de soins et de versements réguliers auprès des éventuelles parties civiles.
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Le comportement en détention du requérant sera également scruté.
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En cas de rejet de la demande par le Tribunal d’application des peines, un appel peut être interjeté auprès de la Chambre d’application des peines (CHAP).
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N'hésitez pas à nous contacter à ce sujet !